Kateri Jourdain : la carte « native » de la CAQ dans Duplessis

Kateri Jourdain : la carte « native » de la CAQ dans Duplessis
Kateri Jourdain : la carte « native » de la CAQ dans Duplessis

La candidate innue de la Coalition avenir Québec (CAQ) y a passé plusieurs moments de son enfance. Elle y jouait avec ses amis et elle est toujours très attachée à cet endroit qui fait face au fleuve. Le rendez-vous est chronométré : 30 minutes, sous l’œil attentif de son conseiller en relations presse.

Il faut dire que, depuis le début de la campagne, l’aspirant député n’a pas tenu en place. Elle enchaîne les réunions, les 5 à 7, les débats…

La jeune femme qui l’accompagne se fait cependant discrète et laisse Kateri Champagne Jourdain défendre sa candidature et les idées du CAQ.

En cas de victoire, Kateri Champagne Jourdain serait la première femme autochtone à devenir députée au Parlement du Québec.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

Il faut dire qu’à 41 ans, Mme Champagne Jourdain n’est pas une débutante. Depuis plusieurs années, elle fait partie des personnalités bien connues de la Côte-Nord et a dû rencontrer à plusieurs reprises des journalistes et des représentants.

Et surtout, elle est du genre à foncer. Femme d’affaires chevronnée, ancienne directrice générale des Galeries Montagnaises, première Autochtone à siéger au conseil d’administration du Mouvement Desjardins…

Le CV du candidat peut en faire rougir plus d’un. Et c’est d’ailleurs pour cela qu’elle a été choisie par François Legault pour représenter le CAQ dans la circonscription de Duplessis.

Kateri Champagne Jourdain a participé au Grand Cercle Economique de Montréal.

Photo : Radio-Canada / Marie-Laure Josselin

Mais ne le serait-elle pas aussi – surtout ? – la caution autochtone de la CAQ qui n’a pas la meilleure réputation parmi les Premières Nations de la province?

J’ai été présenté comme candidat pour l’équipe économique. J’ai un parcours qui me permet d’aider le parti à ce niveau et de bien connaître les enjeux sociaux et économiques de notre région.elle se défend.

>Une femme dans un studio de radio.>

La candidate a un emploi du temps chargé et passe beaucoup de temps à dévoiler le programme de son parti.

Photo: Facebook Kateri Champagne Jourdain

Qu’est-ce que le CAQ est venu chercher chez elle, c’est donc son expérience. Elle ajoute : Mais il est certain que mon côté indigène me permet de comprendre le quotidien de la communauté, car j’y vis et j’y participe..

Entrer en politique était finalement naturel pour cette femme. Être élue serait pour elle l’occasion de faire avancer nos dossiers régionaux.

Sa décision ne surprend pas vraiment Gabriel Striganuk, coprésident de la Chambre de commerce Sept-Îles-Uashat mak Mani-utenam, avec qui la candidate a travaillé.

>Une affiche de candidat derrière la fenêtre d'une maison.>

Dans la communauté innue de Uashat, quelques membres affichent leurs couleurs politiques, mais ils se comptent sur les doigts d’une main.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

Alors qu’il trinque à la fin de sa journée avec des amis au café-bar Edgar, à Sept-Îles, il accorde une petite entrevue impromptue.

Je sais qu’elle songe depuis longtemps à s’impliquer dans un parti politique. Je sais que ça lui a pris beaucoup de temps, mais ce qui pesait dans la balance, c’était de pouvoir faire une différence pour sa communauté et la région de Sept-Îles.dit-il, ajoutant qu’il est tellement contente qu’elle ait décidé de se montrer.

M. Striganuk croit que le candidat de la CAQ a les ressources naturelles à cœur, une très bonne compréhension des enjeux, et elle peut représenter autant les gens de Sept-Îles que ceux de sa communauté.

Cependant, il est difficile de trouver des Innus qui veuillent parler de leur appui ou non au candidat de la CAQ. Les maisons qui affichent leur couleur politique sont rares et quand on frappe à la porte, on nous dit gentiment qu’on préfère ne pas commenter.

Josée Sushei Leblanc ne le dira pas, mais elle aussi a rejoint les rangs de Kateri. Elle aussi est une femme d’affaires expérimentée. Innue de Uashat comme la candidate, elle est la patronne de la compagnie Atikuss.

>Une femme pose dans son magasin.>

Josée Sushei Leblanc croit qu’il est temps que le développement économique de la région soit porté à l’Assemblée nationale.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

Il faut parcourir la page Facebook de la candidate pour voir Mme Leblanc à ses côtés, tracts en main.

J’ai été agréablement surpris de voir des jeunes s’impliquer davantage en politique. C’est une action citoyenne. On peut aller au gouvernement pour défendre une région et pour défendre les nations indigènesexplique-t-elle dans son bureau.

Avoir quelqu’un qui peut parler de la réalité sur le terrain, c’est toujours mieux, surtout si on peut tomber dans un gouvernement qui est au pouvoir. Cela peut montrer aux jeunes que tout est possible maintenantajoute-t-elle encore.

Son souhait : avoir un gouvernement majoritaire qui permettra faire progresser notre développement économique.

>Les gens à l'extérieur avec des tracts à la main.>

La candidate a fait beaucoup d’efforts pour rencontrer la population avec ses partisans.

Photo: Facebook Kateri Champagne-Jourdain

En tout cas, Kateri Champagne Jourdain semble déterminée à porter non seulement les enjeux économiques, mais aussi sociaux de la région à l’Assemblée nationale. Elle aborde des enjeux très spécifiques à la Côte-Nord : besoin en logement, places en garderie, transport, langue et culture autochtone.

Elle dit qu’elle est une personne action, peu connue pour [sa] patience quand il s’agit d’apporter des résultats. Et c’est bien.

La CAQ, c’est moins de paroles, plus d’action. »

Une citation de Kateri Champagne Jourdain, candidate innue

Mais une grande question demeure : comment défendre le programme de la CAQ qui, selon les instances représentatives autochtones, est en désaccord avec leurs intérêts?

Lorsque nous documentons ce qui a été fait par le CAQ en termes de relations de nation à nation et de projets de loi, je considère que c’est le parti qui a fait le plus jusqu’à maintenant. Dans les autres gouvernements, nous avons parlé, sorti des rapports et les avons mis de côté. La CAQ elle met les recommandations en actiondit l’Innu.

>Les gens posent avec des casques et des débardeurs.>

Le candidat a rencontré les travailleurs du Port de Sept-Îles.

Photo: Facebook Kateri Champagne-Jourdain

Le candidat estime également que le CAQ fait avancer la question de la sécurité culturelle et rappelle que le gouvernement de la CAQ a nommé une Autochtone à l’hôpital de Joliette. Toujours au CISSS de la Côte-Nord, des travailleurs, dont un traducteur, ont été embauchés pour accompagner les patients innus.

Cependant, François Legault refuse de parler de racisme systémique. Que pense-t-elle ?

La réponse est solide. La candidate sait que les journalistes vont l’attaquer là-dessus. Il y a certainement des individus racistes et François Legault est le premier à le reconnaître.

Elle assure qu’elle-même, en tant que femme issue d’une union biculturelle, connaît bien le racisme. Sur les deux côtés.

>Un panneau accueillant les personnes arrivant à Uashat avec le fleuve Saint-Laurent en arrière-plan.>

La communauté de Uashat bénéficie d’une situation géographique qui constitue un atout non négligeable pour le développement de son économie.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

Mais les mots sont importants pour les Autochtones. Elle répète : Je suis une personne d’action et je souhaite participer au déploiement de ces actions. C’est comme ça qu’on change les choses.

L’autre dossier fâcheux est celui des projets hydroélectriques dans la région. François Legault veut augmenter la capacité de production de la société d’État. Elle se veut rassurante.

Ce qu’il faut, c’est identifier les sites potentiels. Quand on veut développer un projet d’envergure qui concerne nos grandes ressources, il faut réunir un ensemble de conditions, dont l’acceptabilité socialedit-elle, ajoutant que des études ont été demandées et que des discussions auront lieu une fois ces sites potentiels identifiés.

>Une femme pose avec une pancarte à son nom devant un immeuble.>

Kateri Champagne Jourdain est la seule candidate autochtone de la Coalition avenir Québec.

Photo: Facebook Kateri Champagne Jourdain

Et quelle place Mme Champagne Jourdain pourrait-elle avoir dans un éventuel gouvernement caquiste ?

Le quadragénaire ne veut pas se manifester. Elle rappelle que ces décisions font partie des prérogatives du Premier ministre. Si je suis appelé, je serai prêtelle assure

Les 30 minutes sont écoulées. Le temps d’une petite photo, Kateri Champagne Jourdain est déjà en route vers sa prochaine destination : se préparer pour un débat organisé par la Chambre de Commerce le lendemain. Le lendemain, elle sera à Havre-Saint-Pierre pour un 5 à 7.

Dans une campagne de 30 jours, le temps est précieux et les déplacements se comptent en centaines de kilomètres à Duplessis.

Tout pour plaire à une femme qui se définit avant tout par l’action.

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