L’écrivain et poète Christian Bobin est mort – .

L’écrivain et poète Christian Bobin est mort – .
L’écrivain et poète Christian Bobin est mort – .
Christian Bobin, au Creusot, le 19 mai 2011. ULF ANDERSEN / GETTY IMAGES

Il voulait écrire un « traité du sourire ». Celle de ses chers disparus, capables de les garder hors des eaux noires de l’oubli, celle de l’enfant au berceau qui lui procurait un enchantement particulier. Attribut de l’homme, il lui semblait “l’objet de méditation le plus profond possible”, comme il l’avait confié, en octobre, au Figaro. Christian Bobin, décédé à 71 ans d’un cancer fulgurant, vendredi 23 novembre, en Saône-et-Loire, n’aura pas eu le temps. Cet écrivain singulier laisse pourtant une soixantaine d’ouvrages dont les titres se chuchotent amoureusement entre lecteurs. Des centaines de milliers de fidèles, de tous âges et de toutes conditions, aimantés par sa prose qui rend leur vie plus poétique.

Il a trop souvent été présenté comme un ermite vivant au fond des bois. Il y a du vrai dans cette image, car une fois descendu du TGV au Creusot, dans cette Saône-et-Loire adossée au Morvan, il fallait remonter vers le nord jusqu’à un chemin appelé Champ Vieux et rouler vers la forêt du Petit Prodhun, où se trouvait sa maison aux volets bleus. Aucun voisin sauf oiseaux, chevreuils et arbres.

Il y vécut avec sa compagne, l’écrivaine et poétesse Lydie Dattas – même s’il était récemment revenu au Creusot – et sa porte est toujours restée ouverte aux visiteurs. Nous avons été accueillis par un bon feu, un repas si la conversation continuait, nous avons pu voir la chambre monastique de l’écrivain et plonger dans “l’armoire à confitures”, où se sont côtoyés des auteurs oubliés, Jean Grosjean, André Dhôtel, Jean Follain. On était sûr d’entendre au moins une fois son rire tonitruant, de voir son visage d’argile fendu de joie, surmonté d’un front large, sur lequel s’imprimaient les sentiments.

Christian Bobin a “la meilleure place”, celle du dernier, après un frère et une soeur, mais une enfance silencieuse, un peu solitaire, “le front contre la vitre”

Christian Bobin ne s’est jamais éloigné du Creusot. Il n’en ressentait ni fierté ni honte particulière, c’est comme ça : un voyage immobile. Il y est né le 24 avril 1951, dans une famille comme tant d’autres sous le règne des Schneider, les rois du charbon et de l’acier. Dans la toute-puissante entreprise, son père est designer industriel, sa mère copieuse. Aucune trace de cet univers dans son œuvre, qui est même aux antipodes : la seule usine, la nature, produit l’émerveillement et l’homme des sentiments éternels. Il a “Le meilleur endroit”, celle du dernier, après un frère et une sœur, mais une enfance silencieuse, un peu solitaire, « front contre la vitre ».

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