Ces « pompes » de l’asthme qui menacent l’environnement – .

Ces « pompes » de l’asthme qui menacent l’environnement – .
Ces « pompes » de l’asthme qui menacent l’environnement – .

Malgré eux, les asthmatiques et les patients pulmonaires contribuent plus que le citoyen moyen au réchauffement climatique. Des substances dans leurs « pompes » sont impliquées. Les médecins soucieux du climat demandent maintenant à Ottawa de modifier la réglementation pour remplacer les gaz nocifs et éliminer ces émissions inutiles.

Les inhalateurs-doseurs, de petits appareils qui délivrent des bouffées de médicament dans la gorge d’un patient, contiennent de puissants gaz à effet de serre (GES). Ceux-ci ne servent qu’à propulser l’agent actif. Selon la molécule choisie, un gramme de gaz propulseur réchauffe l’atmosphère 1400 à 3200 fois plus qu’un gramme de CO2.

Ces gaz – les hydrofluorocarbures (HFC), tels qu’on les trouve dans les appareils frigorifiques – sont inhalés par les patients, retenus quelques secondes dans leurs poumons, puis expirés. On les retrouve donc dans l’atmosphère, où ils contribuent à l’effet de serre. Un aérosol-doseur typique contient 10 à 40 kg d’équivalent CO2.

Cela peut sembler peu, mais à l’échelle d’un pays, la somme est considérable. Aucune compilation n’est disponible au Canada. Au Royaume-Uni, les inhalateurs-doseurs occupent une ligne entière du bilan national des GES. Ils génèrent plus de 900 000 tonnes d’équivalent CO2 par an – jusqu’à 300 000 véhicules à essence sur la route, ou un grande cimenterie.

« Le système de santé contribue à aggraver la crise climatique alors qu’il est, paradoxalement, la menace numéro 1 pour la santé au XXIe siècle.e siècle », dénonce l’anesthésiste Stephan Williams, codirecteur médical de la neutralité carbone et du développement durable au Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM). “Mais les inhalateurs-doseurs sont l’un des fruits les plus bas sur l’arbre des choses que vous pouvez changer facilement”, dit-il.

Options alternatives

Des options alternatives existent. Les inhalateurs à poudre sèche ou les inhalateurs à brouillard aqueux, par exemple, n’utilisent pas de propulseurs nocifs. La majorité des patients pourraient y migrer sans problème, selon les spécialistes. Seules les personnes très malades, qui ont beaucoup de mal à respirer, et les jeunes enfants auraient besoin d’un inhalateur-doseur avec gaz propulseur.

L’exemple de la Suède prouve qu’une moindre utilisation des inhalateurs-doseurs est possible, sans pour autant diminuer la qualité des soins. Dans ce pays, ces dispositifs ne représentent que 12 % des prescriptions d’inhalateurs. Au Canada et aux États-Unis, près de 75 % des inhalateurs actuellement prescrits sont des inhalateurs-doseurs. La situation est similaire au Royaume-Uni.

En plus de changer leurs habitudes de prescription, les médecins canadiens veulent s’attaquer au problème sur un autre front. Ils ont demandé cette semaine au gouvernement fédéral de “planifier”, avec les fabricants d’inhalateurs, le retrait des propulseurs à très fort potentiel de réchauffement climatique sur les cinq prochaines années. Ils encouragent Ottawa à organiser le virage vers d’autres propulseurs moins nocifs, qui devraient entrer sur le marché d’ici 2025.

« Le Canada s’est fixé comme objectif la neutralité carbone et des soins de santé à faibles émissions de GES. Voici une belle occasion d’agir! écrivent de nombreuses associations médicales, dont l’Association canadienne des médecins pour l’environnement (ACME), l’Association médicale canadienne et le Collège des médecins du Québec, dans une lettre envoyée jeudi à Steven Guilbeault, le ministre de l’Environnement et du Changement climatique Canada, notamment Le devoir obtenu une copie.

En 2009, Environnement Canada a piloté, en collaboration avec Santé Canada, l’élimination des chlorofluorocarbures (CFC) des inhalateurs-doseurs, car ces propulseurs détruisent la couche d’ozone. Les sociétés pharmaceutiques les avaient remplacés par des HFC. Depuis 2019, l’Amendement de Kigali au Protocole de Montréal exige l’élimination progressive des HFC en raison de leur contribution à l’effet de serre, mais une exception s’applique aux inhalateurs médicaux.

Décarboner les soins de santé

D’après le Dr Williams, membre de la filiale québécoise de l’ACME, éliminer ces émissions inutiles est un pas de prise de tête. « Ce n’est pas au gouvernement d’inventer la solution, mais c’est à lui de donner un cadre réglementaire à l’industrie. Si nous ne donnons pas de directives, il n’y aura pas de résultats », a déclaré l’homme à l’origine de la lettre au ministre.

Déjà, les sociétés pharmaceutiques développent des inhalateurs-doseurs qui fonctionnent avec le HFC152a, un GES beaucoup moins puissant. Les entreprises Chiesi et AstraZeneca veulent introduire ces appareils sur les marchés d’ici 2025. Leur motivation est climatique, mais aussi économique. Le coût de production des HFC à fort potentiel de réchauffement devrait augmenter à mesure que presque toutes les industries les élimineront.

Dominique Massie, directrice générale de l’Association pulmonaire du Québec, souhaite également que les asthmatiques et les patients pulmonaires aient accès à des produits plus respectueux de l’environnement. “Nous voulons informer les patients pour qu’ils demandent à leur médecin une pompe qui n’aggrave pas le changement climatique”, explique-t-elle.

Au Royaume-Uni, un vent fort souffle en faveur de la décarbonisation de la santé. L’été dernier, l’Écosse s’est fixé pour objectif de réduire ses émissions d’inhalateurs de 70 % d’ici 2028. Au cours de l’année 2020-2021, 4,5 millions d’inhalateurs ont été vendus en Écosse, pour un total de 79 000 tonnes d’équivalent CO.2.

Le CHUM, où le Dr Williams, s’est récemment fixé l’objectif d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2040, sans compromettre la qualité des soins. “Le problème n’est pas que nous ignorons les solutions pour décarboner nos soins de santé, c’est que nous ne sommes pas structurés pour le faire”, déplore-t-il. Avec son appel au ministre Guilbeault, le médecin espère voir les choses bouger rapidement.

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