Jean-Roch Boivin est décédé à 79 ans après avoir été expulsé d’une maison de chambres – .

Jean-Roch Boivin est décédé à 79 ans après avoir été expulsé d’une maison de chambres – .
Jean-Roch Boivin est décédé à 79 ans après avoir été expulsé d’une maison de chambres – .

Le critique littéraire à la retraite Jean-Roch Boivin est décédé à l’âge de 79 ans le mois dernier, quelques semaines après avoir essuyé « une renoviction des plus féroces », selon sa nécrologie publiée récemment dans les pages du Devoir. La maison de chambres où résidait le Montréalais a été vidée de la quasi-totalité de ses occupants à faible et moyen revenu, malgré le statut particulier de l’immeuble. Le dernier locataire en place, un réfugié syrien, continue de se battre pour son droit de rester dans les lieux.

Pendant plus de 30 ans, M. Boivin, qui a notamment écrit dans les pages du Devoir et l’ancien magazine Voir, vivait dans le même petit appartement situé juste en face du Square Saint-Louis, dans un immeuble qui en compte 15. Or, il a été racheté début juillet dernier par la société immobilière Modela, représentée par le promoteur Tristan Desautels, qui possède des immeubles à Montréal et en Estrie. Le promoteur a rapidement commencé à signer des ententes de résiliation de bail avec certains des huit locataires de l’immeuble de trois étages afin d’y réaliser des travaux majeurs.

M. Boivin, tout comme Wasim Osman qui habite toujours cet immeuble à ce jour, est l’un des rares locataires à avoir ensuite refusé de quitter les lieux en échange d’une somme, proposée par le propriétaire, qui s’élevait à environ 600 $.

Le propriétaire a alors multiplié les moyens de pression pour tenter de forcer ces locataires à accepter de résilier leur bail, notamment en menaçant d’appeler les pompiers pour les expulser, comme le rapportait Radio-Canada en septembre dernier. Le propriétaire a également demandé à un ouvrier de percer le toit de l’immeuble à plusieurs endroits le 8 août, ce qui a causé d’importants dégâts des eaux dans le logement de M. Osman, qui a dû être évacué temporairement, comme en témoignent les documents déposés au Tribunal administratif du logement. (TAL).

« C’était une cascade », dit M. Osman. La Ville de Montréal a également confirmé à la Devoir épinglant par la suite les propriétaires de l’immeuble pour des travaux effectués sans permis en août dernier.

Je suis convaincu, comme sa famille, que c’est vraiment le stress de tout ça qui l’a tué, carrément

S’ensuivent quelques mois de calme, au cours desquels les rénovations cessent dans le bâtiment. Ensuite, les propriétaires ont obtenu des permis de la Ville pour effectuer divers travaux dans l’immeuble tout en conservant le même nombre d’appartements. Après avoir négocié avec Tristan Desautels, M. Boivin a finalement obtenu de lui une compensation financière de 10 000 $, en échange de la résiliation de son bail, comme en témoigne l’entente fournie au Devoir par les proches du défunt.

Le locataire de 79 ans a donc déménagé le 1euh février dans un nouvel appartement du Plateau-Mont-Royal, après plusieurs jours anxiogènes où il craignait de ne pas trouver un appartement dans le secteur à la hauteur de ses moyens, raconte son amie Anne Dandurand, qui a côtoyé M. Boivin pendant 41 ans. années. « Il a finalement réussi à trouver un logement à la dernière minute, une semaine maximum avant le 1euh février, dans un vieil immeuble où l’administration était très sensible au fait qu’il allait être à la rue », confie-t-elle. Jean-Roch Boivin n’a cependant pu profiter de son logement que pendant deux semaines. Le 14 février, il est conduit au CHUM où il décède cinq jours plus tard.

“Je suis convaincu, comme sa famille, que c’est vraiment le stress de tout ça qui l’a tué, carrément”, lâche Mmoi Dandurand, en référence à l’éviction subie par M. Boivin.

Un seul locataire

Wasim Osman, qui a fui la Syrie en 2016 pour s’installer à Montréal, continue de vivre dans son appartement d’une pièce, pour lequel il paie 635 $ par mois, alors qu’autour de lui, un chantier est en cours. Il peut également voir le travail dans une habitation voisine à partir de fissures qui se sont formées dans le mur de sa maison, a noté Le devoir visiter les lieux. L’appartement voisin, où Jean-Roch Boivin a vécu, n’est déjà plus que l’ombre de ce qu’il était, tandis que la poussière s’accumule dans l’immeuble, dont plusieurs fenêtres sont condamnées.

M. Osman poursuit maintenant Tristan Desautels devant le TAL dans l’espoir d’obtenir une compensation financière de plusieurs dizaines de milliers de dollars pour le “harcèlement” et les “troubles et inconvénients” qu’il affirme avoir subis au cours des derniers mois. Mais ce qu’il souhaite surtout, c’est obtenir un accord qui lui permettra de regagner son appartement après les travaux que le propriétaire souhaite y réaliser dans les 10 prochains mois, comme le prévoit la loi en cas d’évacuations temporaires.

Documents de la Ville de Montréal obtenus par Le devoir montrent également qu’une demande de permis pour transformer la maison de chambres en « immeuble à logements » a été refusée en novembre dernier. Le règlement d’urbanisme du Plateau-Mont-Royal interdit ce type de conversion afin de protéger les maisons de chambres, souvent considérées comme le dernier rempart contre l’itinérance.

Le propriétaire demande alors de nouveaux permis, cette fois pour des réparations majeures qui ne changeront pas la classe du bâtiment et le nombre de logements. Ces permis lui ont été accordés le mois dernier et prévoient 10 mois de travaux dans le bâtiment.

Une « vocation sociale » menacée

Joint par téléphone et par courriel, Tristan Desautels n’a répondu à aucune de nos questions. Il était donc impossible de savoir, notamment, quels seront les loyers après la rénovation.

« La vocation sociale de cette maison de chambres, elle, va complètement disparaître. Car oui, c’est peut-être une maison de chambres, mais avec un loyer à 1 500 $ pour un petit studio, ce n’est plus ce que c’était », prédit l’avocat spécialisé en logement Daniel Crespo Villarreal, qui représente Wasim Osman. Cependant, la Ville n’a aucun pouvoir sur les loyers demandés dans les maisons de chambres.

« Malheureusement, dans ce cas bien précis, nous n’avons aucun levier municipal qui nous permettrait d’aller plus loin », écrit la conseillère Marie Sterlin, responsable de l’habitation pour l’arrondissement du Plateau-Mont-Royal. Le bureau de la mairesse de Montréal, Valérie Plante, estime qu’il « devient urgent de réviser les dispositions du Code civil du Québec pour renverser le fardeau de la preuve qui incombe actuellement aux locataires afin de mieux les protéger des expulsions. et les reprises illégales de logements ».

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